Une nouvelle équipe a pris les rênes du festival qui s’est achevé dimanche 19 septembre. Guidée par l’ombre bienveillante de Betty Berr, la fondatrice du rendez-vous, récemment décédée.
La 26e édition du festival de Contis ne pouvait commencer sans un hommage à Betty Berr, fondatrice de la manifestation en 1996 avec son compagnon, son âme sœur, Rainer Wothe. Arthur H a fait chanter la salle comble « pour Betty et Rainer », tant ce couple paraissait indissociable. Le chanteur a évoqué « une femme qui adorait marcher sur la plage, une femme de soleil, une femme de lumière ».
Après 25 années à la tête du festival, Betty Berr en avait confié les clés à une nouvelle association, « Contis culture et cinéma ». Julien Pitet, son président, se souvient de sa première rencontre avec elle : « j’étais venu voir un film et j’étais seul dans la salle. Je voulais partir. Betty et Rainer m’ont dit de rester, ils m’ont offert un verre et ils ont regardé le film avec moi. On en a discuté après la séance et je les ai plus jamais quittés ». Comme les autres membres de la nouvelle équipe, composée de trentenaires passionnés du 7e art, il a intégré tout naturellement l’organisation de la manifestation et en a appris auprès de ses créateurs les codes si particuliers : « Je suis très rigoureux. Betty et Rainer m’ont transmis une douce folie, qu’ils incarnaient ici. Ils avaient cette capacité à désacraliser le cinéma. Au départ, on ne savait pas faire grand-chose et ils nous ont expliqué les ficelles sans jamais nous brider. C’était ‘essayez par vous-mêmes !'’ ».
« Betty était une femme à deux têtes ; une tête très bronzée, avec les cheveux bouclés ; et une tête très bronzée, avec les cheveux bouclés, qui s’appelle Rainer. »
Arthur H, dans son hommage à Betty Berr et Rainer Wothe
Le public ne s’y trompe pas, fidèle, curieux des trouvailles et pépites que savaient dénicher l’ancienne actrice (aperçue dans des films de Tanner, Deville, Gatlif…) et son complice. Malgré les contraintes dues à la Covid, les spectateurs sont revenus en nombre cette année, ce qui ne surprend finalement pas tant que ça Mathias Fournier, le nouveau programmateur : « la force du cinéma ici, c’est un côté très artisanal, avec une incarnation par les personnes. Il y a un lien direct entre le public et l’organisation, grâce d’abord à la qualité de la programmation. On sélectionne nos films un peu comme un libraire ou un caviste de quartier choisissent leurs livres ou leurs vins en pensant à leurs clients. Et il y a aussi la chaleur, la magie de Contis, avec son décor, son atmosphère hors du temps ».
La station balnéaire de Saint-Julien-en-Born a été gagnée par le virus du cinéma. Julien Pitet a même écrit un livre sur la question*, à partir d’un constat : « Contis, ce n’est seulement qu'une centaine d’habitants à l’année mais un nombre étonnamment élevé de réalisateurs, d'acteurs, de techniciens, notamment dans la nouvelle génération ». « Ici, c’est la vitrine de notre politique de cinéma », abonde Rachel Durquéty, vice-présidente du Conseil départemental, déléguée à la Culture, « Betty et Rainer sont des militants, qui ont réussi le pari fou de créer un festival international dans ce territoire. Et la Maison Bleue est à deux pas. Cette résidence d’écriture**, initiée par le Département, est un dispositif important, au même titre que le Bureau d’accueil de tournages des Landes (BAT40) qui est situé à Dax ».
Pour cette 26e édition, la première sans Betty et Rainer, la nouvelle direction n’entendait pas transformer l’ADN du festival. « Ils avaient créé une identité propre qu’on essaiera de faire perdurer à notre façon », assure Mathias Fournier. On a donc retrouvé des avant-premières de six long-métrages européens, le concours de nanométrages (très-courts-métrages de 45 secondes maximum), les partenariats avec des festivals étrangers ainsi que le concept d’éducation à l’image avec des projections de court-métrages pour les collégiens et – nouveauté 2021 – un jury jeunes. Les séances de réalité virtuelle, instaurées en 2017, se tenaient à la Chapelle : « c’est l’idée de montrer une autre forme de cinéma », revendique Julien Pitet, « on assume ce côté laboratoire et d’aller défricher de nouveaux modes de création, de diffusion, de langage ».
Le cœur battant du festival, qui a assis sa réputation internationale, demeure la compétition européenne de courts-métrages (voir palmarès ci-dessous). L’an dernier, l’édition en visio avait compilé 3 500 vues, notamment de l’étranger (Allemagne, Brésil, Italie, États-Unis). Cette année, l’organisation a visionné 750 films pour en choisir 36, issus de 14 pays différents. Toutes les formes – fiction, documentaire, animation – sont les bienvenues. « Beaucoup de scénarios traitent de femmes fortes, qui réagissent face à des situations compliquées », analyse Mathias Fournier qui « s’est beaucoup amusé à créer une histoire avec plusieurs, parce quand on met deux films côte à côte, ils réagissent entre eux ».
La nouvelle équipe a apposé sa marque avec une nouvelle compétition, dédiée aux films de fin d’études ou autoproduits. « Lorsque les jeunes réalisateurs sortent de l’école de cinéma, ils sont confrontés à un grand vide, à un flottement. C’est dans ce moment de fragilité qu’on a voulu les soutenir. Nous nous voulons un festival d’émergence », explique Mathias Fournier.
Une autre façon, selon Julien Pitet, de rendre hommage à Betty Berr et à sa « passion incroyable pour la jeune création ».