Depuis octobre, Mariline Morin donne des cours de lecture et d’écriture à des adultes en situation de handicap par le biais d’une convention passée avec l’Université populaire des Landes.
« J’aime bien travailler ici », sourit Morgane. À 20 ans, la jeune femme, qui souffre d’un retard mental accompagné de problèmes de motricité fine et d’une légère déficience visuelle, n’a jamais pu rentrer dans les apprentissages malgré de longues années en Institut médico-éducatif (IME). Alors, elle se plie avec enthousiasme aux différents exercices imaginés par Mariline Morin. Celle-ci combine les méthodes des Alphas (de petits personnages qui ont la même forme et font le même son que les lettres) et Borel-Maisonny (les sons sont associés à des graphies et à des gestes). Elle s’appuie sur de multiples supports, figurines, livres, dessins, coloriages, car « plus la concentration est limitée, plus on doit varier les exercices ». Et y ajoute une bienveillante patience, prenant le soin de répéter, d’écouter son élève, de rire avec elle. Sabrina, la maman de Morgane, se réjouit « qu’il y ait encore des gens humains, comme Mariline, qui veulent faire évoluer les personnes en situation de handicap. Ma fille est demandeuse, mais à l’IME, on m’a répondu qu’elle était trop âgée, qu’on ne pouvait rien faire. Or, je vois une jeune adulte qui a envie, qui ne baisse pas les bras. Il faut continuer à se battre ».
Mehdi, lui non plus, n’a jamais renoncé. Ce cuisinier à l’ESAT* du Conte a fréquenté différents établissements, essayé plusieurs méthodes qui « ne fonctionnaient que deux ou trois semaines ». Son sourire se fige lorsqu’il évoque « les commentaires méchants des adultes » : « les paroles font plus mal que les coups ». À bientôt 30 ans, il reprend espoir et confiance en lui. Malgré 5 mois d’interruption de ses leçons en raison d’une santé fragile, il parvient à lire de petits bouts de phrases : « un jour ou l’autre, je saurai lire et compter. Si j’ai des enfants, je pourrai leur apprendre. Et peut-être sortir de l’ESAT pour travailler dans la restauration normale ».
Au total, Mariline Morin accompagne bénévolement 6 adultes porteurs de handicap. À raison d’une à deux séances par semaine, elle leur donne des cours personnalisés, adaptés au rythme et aux centres d’intérêt de chacun. Elle met à leur service une expérience forgée auprès de son fils Louis, atteint d’un autisme lourd rendant compliquée une scolarité conventionnelle. En 2009, elle se met en disponibilité de son travail au Conseil départemental pour lui faire l’école à la maison. Armée de beaucoup d’amour et de la conviction que « ce n’est jamais la faute de l’enfant s’il a des difficultés à apprendre, c’est parce qu’on ne sait pas faire auprès de lui », elle se documente énormément, pioche dans diverses méthodes, fabrique ses propres supports éducatifs. Aujourd’hui, Louis, âgé de 21 ans, a acquis un petit niveau de lecture et d’écriture et travaille dans un ESAT.
Grâce à sa rencontre avec Jean-Baptiste Savary, ancien président de l’Université populaire des Landes (UPL), Mariline signe avec cette structure une convention qui lui permettra, à terme, de valider un diplôme d’État d’accompagnant éducatif et social (DEAES). Pour Aurore Darros, présidente de l’UPL, cet enseignement « rentre tout à fait dans le cadre de nos valeurs. Mariline vient nous rappeler que la vie ne s’arrête pas quand on devient majeur en situation de handicap. Son action est belle, généreuse, courageuse. C’est valorisant pour les personnes en situation de handicap, qui ne savent plus où s’adresser, de suivre un cours à l’UPL. Cela les aide à retrouver l’estime d’eux-mêmes. La dignité humaine et l’humanisme sont les valeurs premières de l’UPL ».
Lorsqu’elle aura acquis son diplôme, Mariline aimerait réintégrer le Conseil départemental afin de proposer des apprentissages à de jeunes adultes illettrés en situation de handicap. Pour l’heure, elle prépare pour le mois de mai des ateliers de jeux de rôle sur les expressions faciales. Le but : donner à ses élèves les clés pour décrypter certaines situations et ne pas se mettre en danger en parlant à des inconnus ou en suivant n’importe qui.
* ESAT : Établissement et service d’aide par le travail. Cette structure permet aux personnes en situation de handicap d'exercer une activité professionnelle tout en bénéficiant d'un soutien médico-social et éducatif dans un milieu protégé.
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